mercredi 20 novembre 2013

De Minutes … en Minutes



                                             


                 Un aimable coup de téléphone de Me Préhu,  m’invite à me rendre chez lui pour y rencontrer un ancien camarade de Faculté, perdu de vue depuis longtemps mais, qui, paraît-il, j’aimerais sûrement connaître.
                C’est très volontiers que j’accepte, ce début d’Automne est magnifique, j’imagine
cette longue suite de peupliers ,véritable coulée d’or faisant l’habituelle haie d’honneur à la
rivière .Des fenêtres du petit kiosque, j’ai déjà admiré ce dernier salut à l’Eté .cela m’étonnerait de ne pas le contempler aujourd’hui.
  Resterons-nous là à deviser ou bien confortablement installés dans les bergères, ces anciens notaires ,bons acteurs et conteurs plongerons-t ils dans leurs souvenirs, pour la plus grande joie de la spectatrice attentive que je suis ; En effet, si les propos des deux hommes auront sûrement des points de communs, je gage que surgiront spontanément de leur mémoire des
Etres et des situations pittoresques.
 A mon arrivée, ils savourent visiblement leur cigare ayant à portée de main leur verre de vieux Calvados. Ainsi, vous vous intéressez paraît-il, à nos radotages de tabellions en retraite ? J’avoue que les moments que je passe avec notre hôte commun me sont toujours très agréables .Il me fait pénétrer dans un univers inconnu qui ne laisse pas de m’étonner.  
 Pendant que je déguste le cake parfumé que vient de m’apporter mademoiselle Marthe accompagné de mon thé préféré, Me Préhu, s’adresse à son ami : raconte-nous donc, pour commencer, cette histoire de famille que tu as évoquée pendant le déjeuner.
-Eh bien, voici : je vous la livre sans avertissement ,celles que vous avez entendues de mon ancien camarade de promotion, n’étaient sûrement pas édifiantes non plus..
 La famille G était considérée dans la petite ville dont je tairai le nom, évidemment, comme un exemple à suivre, nombreux enfants, réussis intellectuellement, scouts les uns après les autres, la situation de monsieur, directeur de banque, laissant à Madame la possibilité de se faire servir et de s’adonner aux bonnes œuvres.
Le père de la tribut, était en outre musicien et tenait l’orgue à l’église, bref, exemplaire.
 La dernière fille non mariée, avait, semble-t-il eu mois de chance, mais très attachée à ses parents, ellete., il avait le temps de s’en occuper.

       Mademoiselle Marthe nous interrompit pour s’enquérir de nos désirs éventuels, et Maître Ladien poursuivit.
  Monsieur G était un homme d’ordre et méticuleux, son bureau était un modèle de rangement .Celui que nous appellerons André n’eut aucun mal à retrouver les carnets de chèques, les relevés de banque classés par année, les factures de toutes sortes, les doubles des bulletins de salaire des domestiques . Il sut tous les prix des différentes voitures, les frais de garagiste,
de pourboires et, je dois faire état d’un détail vraiment cocasse, un carnet spécial était destiné à  ses bonnes œuvres, quêtes et denier du culte inclus !!!
Armé de son téléphone ,comme le brigadier du théâtre, il annonça que le »spectacle » pouvait commencer, tout le monde pouvait venir.
      A l’arrivée des frères et sœurs tous les meubles , bibelots, lustres, argenterie, étaient dûment étiquetés de la valeur estimée.
 La table de la salle à manger dépliée dans toute sa longueur était recouverte des innombrables  élément leur rendait de multiples services .
 Les sept enfants, vois ai-je dit leur nombre devinrent chirurgien, officier de marine, haut fonctionnaire, directeur de société etc, etc il y eut même parmi eux un prêtre qui malheureusement se laissa bercer par les sirènes de Mai 68 .je vous donne tous ces détails , car on ne pouvait pas s’attendre à des bouleversements dans l’avenir.
                                                  
          Les deux parents s’éteignirent tous deux à un âge respectable et, à très peu temps de distance .La succession ne fut ouverte qu’après le décès du dernier. C’est là que les choses prirent une tout autre tournure .
        Le fils aîné s’arrogea le droit d’élire momentanément domicile dans la maison mortuaire,
au chagrin de sa jeune sœur ;Il signifia qu’il prenait les chose en mains, inventaire par commissaire priseur, et qu’il allait mâcher le travail du notaire pour que la succession ne traîne pas, il était l’aîné, et, déjà en retrais de comptabilités précités.
Il détailla par le menu les biens et valeurs de ses parents ;
 Aucune difficulté ne sautait aux yeux des héritiers .La petite dernière, que nous appellerons Marie suggéra d’avoir une pensée reconnaissante pour les Père et Mère qui leur léguaient a autant                                        
 Nous y voilà proféra André sue un ton qui fit sursauter l’assemblée, ainsi que mon clerc qu’on y avait prié.
 L’ordonnateur des hautes œuvres brandit un livre de comptes, et un carnet de chèques sous les yeux de Marie ;Oui, remercions tous notre Père pour la tenue de ses comptes .
 A telle date, ma chère Marie, tu as perçu de notre Père, un chèque de telle valeur,
-Oui, Papa m’a appelée pour me dire que je n’avais pas pu faire les mêmes longues études que mes frères et sœurs  ,et,  il m’a , en , effet, remis ce chèque . 
  murmure d’approbation de la majorité..           
Cela serait une injustice .désapprobation de la majorité
Il Y a mieux .Je garde le plus beau pour la fin .
 Mes études terminées, et, ayant déjà une situation, j’ai demandé une certaine somme à mon Père ;Elle est du reste consignée dans ses papiers .qu’a-t-il répondu ? ou plutôt, qu’a-t-il fait ?
J’ai dû lui signer un reçu, tu n’as pas eu à le faire, ma chère Marie, et, en plus, il a exigé que je lui verse à dates convenues, les intérêts équivalents à ceux de la caisse d’Epargne ! Vous appelez cela la justice ? –Tu n’étais pas dans le besoin, que je sache, omit un autre frère .
-Les parents ont jugé ,nous n’avons pas à revenir là-dessus .
Cela n’est pas du tout mon avis, et , certainement pas celui d’un juriste, dit-il en s’adressant au clerc présent. Celui-ci se retrancha derrière son patron .
Les frères et sœurs blâmèrent leur aîné .la discussion devint orageuse . Marie l’interrompit
en disant qu’une fois toutes les estimations terminées, on déciderait pour elle la façon de s’acquitter de sa dette.
Notre père doit se retourner dans sa tombe, ce devrait être à la majorité de décider, dit le haut fonctionnaire .
Agissez comme vous voulez, repartit André, j’irai même jusqu’au procès, j’ai tout mon temps.
Donc, si je comprends bien, rétorqua le directeur .Il va nous falloir attendre de connaître le montant de la succession, immeubles, mobilier, et numéraires compris pour savoir comment Marie se libèrera .As-tu pensé à la façon dont elle a entouré nos parents, puisque nous étions tous éparpillés en  France .
-c’est un concours de circonstances ,mais, mon Père n’a pas fait disparaître la trace de ses largesses ;Ordonné comme il était, cela  ne doit pas nous échapper. Marie devrait, au contraire, me remercier de ne pas tenir compte des intérêts, et , je vous ferai remarquer que vous en seriez tous bénéficiaires. Nous lui faisons un fameux cadeau !
Marie jeta un coup d’œil circulaire, formulant, dans son cœur un adieu renouvelé à ses parents et, se demandant, m’a-t-elle dit plus tard, quel souvenir elle pourrait garder de cette réunion de famille. .Elle entendait, comme dans un brouillard évoquer les bagues de fiançailles offertes aux fiancées des garçons, on ergota même sur le prix du calice offert au moment de l’ordination. .
Il resterait à produire chez le notaire, les frais de sépulture, et, on concèderait m^me à Marie
Le remboursement du repas offert le jour de l’enterrement et commandé par elle sans l’approbation de tous .
 Le troisième et dernier acte eut lieu à l’étude.
Le notaire mentionna les monuments funéraires familiaux ;hélas ,ils étaient au nombre de cinq ! Il en aurait fallu sept. !
J’ai eu du mal à garder mon sang froid, ajouta Maître Ladien, Seule Marie ,vivant sur place entretiendrait régulièrement la tombe de ses parents…
 Très calmement tout de même, je déclarais que pouvaient prétendre à une place dans tous les monuments énuméré »s ,je déclarais la succession close.

      L’après-midi tire à sa fin ,et, je dois prendre congé de ceux qui m’ont fait passer un si agréable moment.
  Tout en roulant au volant de ma voiture je ne peux m’empêcher de penser à une famille que je connais bien,
 Dans la même allée du cimetière de la commune ,dont ils sont propriétaires de la majorité des
Fermes, sept monuments funéraires identiques sont alignés. Ont-ils eu peur de se retrouver encore discutaillant  à quelques mètres sous terre ? Se disputent-ils toujours leur place au Paradis ?

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